Saint-Pétersbourg vue par Gogol


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" En songe ou éveillé, c'est de Pétersbourg que je rêve, et avec lui du service de líétat. "
Lettre à sa mère du 26 février 1827


" Je dois vous dire que Pétersbourg ne m'a pas paru du tout comme je le pensais ; je l'imaginais beaucoup plus beau, plus grandiose, et les bruits que d'autres faisaient courir sur son compte sont eux aussi faux. Pour vivre ici pas tout à fait comme une bête, c'est-à-dire pour avoir sa pitance une fois par jour, c'est incomparablement plus cher que ce que l'on pensait. Pour l'appartement nous [Gogol et un ami] payons quatre-vingt roubles par mois, avec le bois et l'eau. Il comprend deux petites chambres, et nous avons le droit d'utiliser la cuisine de la propriétaire [...] Tout cela m'oblige à vivre comme dans un désert, et je suis contraint de renoncer à mon plus grand plaisir, le théâtre. [...] Pour le voyage à lui seul, j'ai dépensé plus de trois cents roubles, et ici l'achat d'un habit et d'un pantalon m'a coûté deux cents roubles, puis une centaine est partie dans l'acquisition d'un chapeau, de bottes, de gants, le paiement des cochers et autres viles mais nécessaires bagatelles, et encore 80 roubles pour faire modifier mon manteau et acheter un col de fourrure ! "
Lettre à sa mère du 3 janvier 1829 (Gogol est arrivé à Petersbourg fin 1828)


" Chaque capitale est caractérisée par sa population qui lui imprime le cachet de sa nationalité, mais Saint-Pétersbourg n'a aucun caractère. [...] Il y règne un calme extraordinaire, aucun esprit n'anime la population, il n'y a que des fonctionnaires et des officiels, tous ne parlent que de leurs directions et de leurs ministères, tout est écrasé, enlisé dans des occupations inutiles et insignifiantes, dans lesquelles ils dépensent stérilement leur vie. Il est amusant de les rencontrer sur les boulevards, les trottoirs ; ils sont à tel point occupés par leurs pensées qu'en les croisant on les entend gronder et discuter avec eux-mêmes, en s'accompagnant parfois de contorsions et de gesticulations. "
Lettre à sa mère du 30 avril 1829


" Mystérieuse, énigmatique année 1834 ! Où te marquerai-je de grandioses travaux ? Au milieu de cet amas de maisons entassées les unes sur les autres, de rues bruyantes, de fébrile mercantilisme, de cet amas informe de modes, de parades, de fonctionnaires, de féroces nuits nordiques, de lustre et de basse grisaille ? Ou bien dans mon beau, mon antique Kiev, Terre promise couronnée de jardins luxuriants, ceinte de mon magnifique, merveilleux ciel du midi, avec ses nuits enivrantes, sa rive haute couverte de buissons, ses harmonieux ravins et mon Dniepr, mon pur et rapide Dniepr qui l'affouille ? "
Carnets


" Il y a là quelque chose d'une colonie européano-américaine, tant il y a peu de caractère national et díamalgame étranger qui ne s'est pas encore fondu en une masse homogène. "
Notes sur Pétersbourg, Le Contemporain, 1836


" Quelle idée, vraiment, d'aller reléguer la capitale de la Russie tout au bout du monde ! Et quelle nation bizarre nous sommes: notre capitale, c'était Kiev ; mais comme il y faisait trop chaud, nous avons transféré nos pénates à Moscou, et comme à Moscou il ne faisait pas assez froid, nous nous en sommes pris à la Providence, qui nous a gratifiés de Saint-Pétersbourg. [...] Pétersbourg est un homme d'ordre, un Allemand exact qui suppute tout avec économie et regarde au fond de sa poche avant de donner une soirée ; Moscou est un gentilhomme russe qui s'en donne à cúur joie quand il s'amuse, et ne s'inquiète pas de prodiguer ses ressources [...]. Les revues moscovites parlent de Kant, de Schelling, etc. ; celles de Pétersbourg ne parlent que du public et des múurs bien-pensantes. A Moscou, les revues marchent avec leur temps mais paraissent toujours en retard : à Pétersbourg, elles ne suivent pas le siècle, mais paraissent avec exactitude à la date fixée. A Moscou, les hommes de lettres mangent de l'argent; à Pétersbourg, ils en gagnent. Moscou sort toujours emmitouflé dans une pelisse d'ours et le plus souvent pour aller à un dîner : Pétersbourg en redingote de ratine, les deux mains dans les poches, file à toute allure à la Bourse ou au bureau [...].Moscou ne se soucie pas de ses habitants, et envoie des marchandises dans toute la Russie. Pétersbourg vend des cravates et des gants à ses fonctionnaires [...]. Moscou est nécessaire à la Russie. Pétersbourg a besoin de la Russie. A Moscou, on rencontre rarement un bouton armorié sur un habit, à Pétersbourg, il n'y a pas d'habit sans boutons armoriés. "
Notes sur Pétersbourg, Le Contemporain, 1836

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